Villa mauresque

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Villa mauresque

Parmi les liens qui, depuis près de quarante ans, unissent Floc’h, l’illustrateur, et Rivière, l’auteur, l’anglophilie n’est pas le moins évident — ni le moindre des arguments du charme que distille le fameux duo. Lequel, à quatre mains donc, par le texte et par le dessin également dosés, s’est attelé cette fois à la biographie de l’écrivain Somerset Maugham (1874-1965), l’un des plus prolifiques et célèbres auteurs britanniques du XXe siècle — l’un des plus lus aussi, bien que la critique ait toujours reproché une certaine forme d’académisme à celui qui, pourtant, avait su s’attirer la reconnaissance de la peu complaisante Virginia Woolf… Son visage, autant que ses livres (Servitude humaine, Le Fil du rasoir…), est universellement connu, et l’élégante et si précise ligne claire de Floc’h sait à merveille capter les traits de ce « petit homme disgracieux et peu amène », ainsi que le décrit l’un des témoins appelés à la barre par François Rivière dans cet ouvrage habilement construit comme une suite d’interventions de ceux qui le connurent, auxquelles se mêle la voix de Maugham lui-même.

Il rêvait de « voyager et de devenir le plus célèbre écrivain vivant », et parvint à ses fins. Mais cet errant se choisit pourtant un port d’attache : la Villa mauresque, luxueuse thébaïde posée au bord de la Méditerranée, dans le sud de la France. Loin, disait-il, « du regard scrutateur de la vertueuse Angleterre ». Orgueilleux, craintif, égoïste, capricieux, généreux, chagrin, pervers… : la biographie est elliptique, mais le portrait, lui, ne cesse de gagner en complexité et en nuances, au fil des témoignages, éventuellement contradictoires, de ses amis, de ses amants, de ses proches. Un « petit homme contrefait mais charismatique, réputé pour ses bons mots vachards et son bégaiement » pour l’un, mais pour une autre, plus tendre, un « homme contrarié depuis toujours, et qui, quelle que fût sa posture, attirait les sarcasmes des gens si prompts à juger ». Un « heureux hédoniste », concluait-il lui-même, comme pour couper court…— Nathalie Crom

 

Ed. La Table ronde 104 p., 20 €.

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