Une si lente obscurité

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Une si lente obscurité

Il s’appelle Martin, son âge est incertain, comme l’époque dans laquelle il vit. Il est né à Laon et a été élevé « à la crème fraîche et au picard », la langue du Nord. Un homme banal, sans qualités, petite entreprise, province grise, existence ordinaire. Une famille étriquée, pas d’amis, ni d’amours, sinon ta­rifées. L’auteur se garde d’en dire plus, et le saisit au moment où sa mère et sa sœur l’appellent pour venir à Limoges, au chevet du père. Immédiatement entraîné dans le flux de pensée de cet homme qui plonge lentement dans l’obscurité, le lecteur descend avec lui, palier après palier, chaque nouvelle partie plus courte que la précédente. Martin tourne en cage dans sa petite vie, son discours se rétrécit, sa tête gîte dangereusement, c’est le bateau ivre qui prend l’eau de toutes parts, jusqu’au naufrage. S’il n’est pas du niveau du Dernier Contingent, qui avait reçu l’an dernier le prix Télérama-France Culture, ce nouveau roman est une extraordinaire expérience de lecture. Difficile de s’extraire de ce singulier monologue, de ce lent et fascinant fondu au noir, difficile de ne pas être bousculé par cette langue si inventive, tordue, pétillante, ensemencée de patois picard. Il y a de la vie dans cette langue, un crépitement qui lui donne toute sa saveur, sa poésie, son énergie. On rit et on pleure tout à la fois. Car il est drôle et mordant, ce Martin qui se désagrège sous nos yeux, mais dont l’esprit résiste, se bat, continue d’exister malgré tout. Jusqu’à la fin, proprement sidérante.

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