Un dernier verre au bar sans nom

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Un dernier verre au bar sans nom

Charlie revient de la guerre de Corée. Jaime a perdu son père et se retrouve sans le sou. Dick Dubonet voit sa première nouvelle publiée dans Playboy. Stan cambriole des maisons en plein jour. Tous veulent être écrivains mais restent des marginaux, à deux pas du succès ou du gouffre. Dans ces années 1950-60, alors que la Beat generation domine les esprits et montre le chemin de la création, ils sont une bande de copains, rêveurs et assoiffés, entre San Francisco et Portland. Un jour dans la lumière, et le lendemain dans un sale état. Don Carpenter (1) (1931-1995) accompagne chacun d’eux avec une même affection, piquant l’attitude mélancolique de l’un, l’aisance ou la fantaisie d’un autre, et ce désir qui les tient tous éveillés et incontrôlables, buvant ensemble le dernier verre puis un autre.

L’auteur de Sale Temps pour les braves ne fait pas de gras ni de manière pour brosser le portrait de ces garçons et filles qui s’échinent à écrire des textes, les publier, les vendre et puis recommencer. On sent derrière eux l’ombre de la guerre, celle de la broyeuse hollywoodienne, les nuits d’alcool qui laissent les yeux mités et l’esprit en capilotade. On pense à Richard Brautigan, à John Fante, à tous ces auteurs que Don Carpenter fréquentait. C’est à un autre écrivain, Jonathan Lethem, qu’on doit de lire aujourd’hui ce Dernier Verre au bar sans nom dont le manuscrit était demeuré inachevé. Dans une belle postface, Lethem explique qu’il s’est contenté d’élaguer la version brute. Il cite également Richard Yates, et la comparaison semble appropriée tant les deux auteurs américains partagent l’amour du détail juste qui provoque chez le lecteur une émotion brute, et un état de grâce inattendu. — Christine Ferniot

 

(1) Don Carpenter est également l’auteur de Sale Temps pour les braves (1966), chef-d’oeuvre édité pour la première fois en français en 2012 par les mêmes éditions Cambourakis.

 

Fridays at Enrico’s, traduit de l’américain par Céline Leroy, éd. Cambourakis, 384 p., 24 €.

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