Ohio, fin des années 2000. A la mort de son père, le jeune Maxwell Roth découvre sa passion cachée : le discret employé de bureau a consacré son existence à collectionner tout ce qui a trait à un obscur personnage de comics des années 1940, « l’Artiste de l’évasion ». Un héros masqué mais sans superpouvoir, sinon une extrême habileté à se libérer des cadenas les plus tordus. Fasciné par ce curieux héritage, l’adolescent entreprend de lui donner une nouvelle dimension. Timide et inexpérimenté, mais débordant d’idées et d’audace, Maxwell n’a plus qu’un but : faire renaître les héros de papier de leurs cendres… Partant de ces prolégomènes somme toute classiques, le scénariste Brian K. Vaughan accomplit un tour de force. Avec ce « one shot », publié aux Etats-Unis en 2006, le futur auteur de séries télé à succès (Lost, Under the Dome) marque son profond attachement à l’univers de la BD. Evocation de l’âge d’or des comics inspirée du romancier Michael Chabon (Les Extraordinaires Aventures de Kavalier & Clay), The Escapists est une formidable fiction qui expose les coulisses, parfois peu reluisantes, de l’industrie du divertissement.
Superposition de genres et d’intrigues, ping-pong narratif, multiplication des points de vue… The Escapists n’a rien pourtant de ces pièces montées indigestes qui dominent le marché des comics. Jouant avec les contraintes, utilisant avec brio les différents registres graphiques des quatre dessinateurs qui cosignent avec lui la série, Brian K. Vaughan livre un récit aussi vif que limpide… et une cinglante leçon de savoir-faire. Les grands anciens ne s’y sont d’ailleurs pas trompés qui, d’Alex Ross à Frank Miller en passant par Paul Pope, ont accepté de réaliser les couvertures. Bien moins connu que les blockbusters Y, le dernier homme ou Saga, qui ont fait du jeune prodige un auteur célébré, The Escapists est pourtant un petit chef-d’oeuvre à découvrir. — Stéphane Jarno
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Jérémy Manesse, éd. Urban Comics, 184 p., 17,50 €.
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