Terra Australis

Ajouter un commentaire

Terra Australis

Ce qu’on savait : à la fin du XVIIIe siècle, l’Australie n’est encore qu’un trou noir géographique quand l’Angleterre décide d’y déporter un millier d’hommes, de femmes, bagnards, prostituées et condamnés, à tort ou à raison, de tout poil, pour y fonder une nouvelle colonie. Ce qu’on découvre dans Terra Australis est nettement plus complexe, quoique très simple au départ : personne n’y croit, à commencer par le capitaine Arthur Phillip, choisi pour commander l’expédition avec la promesse de devenir le gouverneur d’un pays qui n’existe pas.

Des prisons immondes de Londres à l’illusoire « paradis » des énigmatiques aborigènes, en passant par une périlleuse traversée maritime qui durera huit mois, LF Bollée orchestre, en trois temps et un seul mouvement d’envergure, une épopée en creux, sans héros, fidèle reflet d’un contexte sans gloire — il s’agit d’abord de vider les prisons surpeuplées de Londres et, pour la Couronne, de faire oublier la perte des colonies américaines.

Enrichi par une myriade de détails vrais glissés dans le flot de l’aventureuse équipée, illustré par un dessin à la plume et au lavis d’un réalisme af­fûté qui lui donne de l’allant, le récit échappe à la pente naturelle du plombant didactisme académique en BD. On pense plutôt à certaines très bonnes séries télé grand public (Rome, par exemple), où tout l’art consiste à tisser ensemble les fils de multiples destins individuels, réels et de fiction, sur l’impeccable trame de l’Histoire en marche. Alors qu’on a — un peu trop — claironné l’ampleur exceptionnelle du projet (plus de cinq cents pages, cinq ans de recherches et d’écriture, etc.), la vraie prouesse, dans cette surabondante chronique d’une idée folle, est ailleurs : déroulée au ras des faits et à hauteur d’homme, elle préserve, jusqu’au bout ou presque, un bel élan romanesque. Pas si simple… — Jean-Claude Loiseau

 

Ed. Glénat 512 p., 45 €.

Commandez le livre Terra Australis

Laisser une réponse