Rien que la vie

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Rien que la vie

Lisez Munro, il le faut, parce que « plus que n’importe quel écrivain depuis Tchekhov, [elle] vise et atteint, dans chacune de ses histoires, une perfection dans la représentation de ce qu’est une vie », s’exclamait il y a dix ans Jonathan Franzen (Les Corrections, Freedom), pour inciter le public américain à découvrir la grande nouvelliste, née en 1931. A ses exhortations, les jurés suédois du prix Nobel de littérature ont joint, il y a tout juste un an, leurs persuasives voix : Alice Munro est devenue le premier écrivain canadien à ­recevoir leurs glorieux lauriers.

Les nouvelles – une quinzaine – qui composent Rien que la vie (titre moins teinté d’ironie que le Dear Life, « chère vie », de la version originale), recueil paru avant le Nobel, illustrent de façon exemplaire l’art subtil et si précis de Munro : un ancrage chronologique flou qui donne à ses histoires un parfum d’intemporalité et d’universalité, un petit monde fictionnel de gens ordinaires, maris, femmes, amants, enfants, ouvriers, pasteurs… Que Munro embrasse en quelques pages une existence tout entière, ou qu’elle s’empare de quelques heures dans la vie d’un personnage, c’est le destin lorsqu’il vacille et bascule qu’elle scrute. Sans une once de romantisme ou de molle candeur. Spécialement à l’affût, chez les femmes, les hommes sans qualités qui peuplent son univers, des mouvements les plus triviaux, les moins sublimes du coeur et de l’âme. Les désarrois, les désordres, les faiblesses, les lâchetés, les égoïsmes, les rancunes.

C’est, par exemple, une mère qu’étreint soudain la culpabilité de n’avoir pas aimé son enfant comme sans doute il aurait fallu, de l’avoir entouré d’« une attention fractionnée, [une] tendresse relevant souvent d’une tactique ». Ou, de façon inverse, une fille qui délaisse sa mère malade. « De certaines choses on dit qu’elles sont impardonnables, ou qu’on ne se les pardonnera jamais. Mais c’est ce qu’on fait – on le fait tout le temps. »

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