Quand vous pensiez que j’étais mort

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Quand vous pensiez que j’étais mort

Il y a les mots pour essayer de reconstituer « un cataclysme inconcevable ». C’est ce qui frappe d’entrée : Matthieu Blanchin est un dessinateur qui écrit au scalpel, au plus près du « bourbier sensitif » où il a plongé brutalement le 20 avril 2002. En résumant : dix jours de coma, une trépanation pour cause de tumeur virulente, une survie affolée, une rechute, des crises d’épilepsie, une mémoire chahutée où les souvenirs nés du coma peuvent être pourtant incroyablement nets, mais aussi « crûment ambivalents ». Et la lente, pénible, fragile renaissance, en dépit de la difficulté qu’il a à rétablir le contact avec son entourage, à se faire comprendre de certains médecins. Il émerge petit à petit, grâce à des traitements plus ou moins orthodoxes, mais par l’écriture aussi, que lui a suggérée son psy, et par le dessin enfin, que l’auteur d’une remarquable biographie de Calamity Jane (1) aura tant de mal à réapprivoiser.

Cette expérience était a priori irracontable. Blanchin lui-même a pu le penser. Et pourtant il en restitue, en noir et blanc, d’un trait qui happe, secoue, déchiquette, la vision intense et immédiate d’une interminable reconquête de soi-même : à la fois le ressenti intime, un écheveau de « lambeaux de sensations » éprouvées dans « un assaut virulent d’images » et les déchaînements visuels hyperboliques d’une (in)conscience fracassée. Il a fallu plus de dix ans à Matthieu Blanchin pour s’en sortir, c’est-à-dire mettre au jour, avec un acharné besoin de tout dire, un envers du visible complexe, confus, intimidant, où il a flotté entre (fréquents) cauchemars et (brèves) extases. L’aventure est suffocante pour le lecteur aussi. — Jean-Claude Loiseau

 

(1) Martha Jane Cannary, scénario de Christian Perrissin, 3 tomes (2008-2012), éd. Futuropolis.

 

Ed. Futuropolis 160 p., 24 €.

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