Nos disparus

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Nos disparus

C’est en France, juste après l’armistice de 1918, que Sam Simoneaux gagna le surnom de Lucky. Il venait, de Louisiane, se battre pour la liberté, mais se retrouva à nettoyer les champs de bataille d’Argonne, truffés d’obus et de cadavres. Le surnom convient bien mal à cet orphelin, inconsolable du massacre de sa famille par des voyous, taraudé par la mauvaise conscience du survivant. De retour à La Nouvelle-Orléans, pour retrouver une fillette enlevée, Lucky embarque sur un bateau qui sillonne le Mississippi, faisant danser, boire et jouer une clientèle souvent modeste. Au rythme du jazz, des bagarres sur le pont du steamboat et des escales près des bayous, notre homme glane des informations sur un trafic d’enfants, qui l’amèneront finalement à retrouver les meurtriers de ses parents.

Conscience, culpabilité, attachement filial formaient déjà le coeur du premier roman de Tim Gautreaux, Le Dernier Arbre, fiction rugueuse et lyrique, traversant l’Amérique sudiste des années 1920, gorgée de misère, de racisme, de moustiques. Avec Nos disparus, il préfère longer le fleuve, adopter le rythme du courant, tantôt agité de remous violents, tantôt poisseux et lent, quand la chaleur se fait écrasante. Grand lecteur de Faulkner et de Flannery O’Connor, les maîtres de la littérature du Sud — où Gautreaux est né, en 1947, à Morgan City, fils d’un capitaine de remorqueur —, l’écrivain construit une fresque musicale et terrienne autour d’un homme qui ne se remet pas de son enfance : Sam, personnage honnête et mélancolique, courageux jusqu’à l’obstination, qui finira par mériter son surnom en comprenant la vanité du désir de vengeance. — Christine Ferniot

 

The Missing, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Marc Amfreville Ed. du Seuil 540 p., 23 €.

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