Neverhome

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Neverhome

Constance Thompson quitte sa ferme avec en poche 20 dollars, des biscuits et des pommes. Elle part faire la guerre à la place de son mari, trop faible pour affronter les violences qui dévastent les paysages et anéantissent les indi­vidus. Travestie en homme, elle rejoint tous ceux qui sont destinés à mourir ou à finir estropiés. Armée de son Springfield 1861, elle qui peut découper les oreilles d’un lièvre à cent cinquante mètres fait merveille et devient une légende. La guerre de « Gallant Ash », comme on surnomme Constance après qu’elle a revêtu une femme de sa veste, est surtout faite de longues attentes et de marches forcées, qui ne mènent nulle part. Constance creuse des tombes pour y déverser les cadavres, coupe des rondins et compte les étoiles en rêvant. Sa vie d’avant, celle où elle tenait sa ferme avec son mari, fuit à toute vitesse, ne tenant plus qu’aux lettres qu’elle envoie, à celles qu’elle reçoit de celui qui n’espère plus la revoir vivante. La fumée des batailles, les charges de cavalerie, les gémissements des blessés, la stupeur qui suit, Constance les traverse sans faiblir, espérant simplement retourner un jour vers celui qu’elle aime… Ce serait réduire ce magnifique roman de Laird Hunt que d’en faire une simple évocation de la guerre de Sécession, la plus meurtrière de l’histoire des Etats-Unis. Never­home est d’abord un livre où la nature berce les âmes et se fait, au gré des combats, enchanteresse ou carnassière. Un livre où les esprits des morts viennent hanter ceux qui se nourrissent de souvenirs. On y retrouve les échos des poèmes de Melville sur la bataille de Shiloh et des songes de La Maison d’haleine, de William Goyen. Quant à Constance, femme soldat, elle vient humblement prendre place parmi les plus beaux personnages de femmes de la littérature américaine. — Gilles Heuré

 

Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Anne-Laure Tissut, éd. Actes Sud, 272 p., 22 €.

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