Moi, assassin

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Moi, assassin

Tuer n’est pas un crime. Tuer est un art. Pour Enrique Rodríguez Ramírez, professeur d’histoire de l’art à l’université du Pays basque, la théorie ne vaut que par la pratique qui la valide. « Je tue peu, dit-il. Un ou deux crimes par an. » A 53 ans, cet universitaire dirige un groupe de recherche sur « la douleur et le supplice dans la peinture occidentale ». Il est au zénith de sa carrière tout en ayant conçu, puis exécuté, trente-quatre assassinats, sans jamais être soupçonné. De purs exercices de style dans le registre du crime gratuit. Enrique affirme tout au long l’exigence, esthétique d’abord, d’un homme qui n’agit jamais à la légère et qu’Antonio Altarriba exonère de tout jugement moral. C’est la décisive originalité de ce thriller cultivé, sous-tendu par les références argumentées d’Enrique (« L’art moderne, qui débute avec Goya, n’a pas abandonné sa vocation à terrifier », professe-t-il), mais aussi la satire au scalpel des hypocrisies académiques ou des impostures d’artistes opportunistes.

Ce que vit banalement, au quotidien, Enrique Rodríguez Ramírez – la rupture avec son épouse ou l’affrontement avec des collègues basques cherchant à absoudre l’ETA – n’imprime que plus de relief à ses très inventifs passages à l’acte, qu’il nomme sobrement « bloody painting » ou « puzzle murder ». Une ironie incisive infuse dans le dessin de Keko, un noir et blanc dense, atmosphérique, avec des ponctuations de rouge en éclaboussures macabres ou taches subreptices. Elle décale avec une audace très contrôlée (voir le fulgurant paradoxe final) cette histoire savoureusement cauchemardesque.

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