Limbo

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Limbo

A l’heure où, films pour ados aidant (Hunger Games, Le Labyrinthe…), la dystopie (peinture d’un futur anti-utopique) est de nouveau à la mode, saluons la nouvelle édition d’un roman qui demeure, au même titre que 1984 ou Le Meilleur des mondes, un des classiques du genre. Ecrit en 1952 par l’Américain Bernard Wolfe (1915-1985), écrivain rare qui ne fit qu’une incursion dans l’anticipation, Limbo met en scène un pacifiste, le docteur Martine, réfugié depuis dix-huit ans sur une île afin d’échapper à la Troisième Guerre mondiale mais contraint de retourner à la civilisation. Là, il découvre un monde pacifié. Et pour cause : les guerriers, qu’une efficace propagande pousse à se faire amputer bras et jambes, sont devenus des « immob » (de « immobilisation »), équipés de prothèses qui leur sont ôtées en cas de violence. Il y a quelque « hénaurmité » dans ce postulat. En dépeignant cette société au pacifisme obligatoire, Bernard Wolfe, avec un humour très noir, fait surgir un nouvel enfer, où l’homme n’est plus libre de se construire. Lui qui écrivait en pleine guerre froide démonte toutes les idéologies et parvient à glisser au fil de son intrigue des références à Aristote, Marx ou Freud. Savant et passionnant, ce coup de maître, placé très haut par la critique américaine, nous revient dans une nouvelle traduction enfin intégrale qui rend pleinement hommage aux multiples jeux de mots et à l’ironie dont Bernard Wolfe, grand admirateur de Joyce, a parsemé son opus. — Hubert Prolongeau

 

Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Patrick Dusoulier, éd. Le Livre de poche, 718 p., 21,90 €.

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