L’Homme au fond

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L’Homme au fond

Une page presque vide annonce « Vingt ans passent », juste à mi-chemin du roman, de telle sorte que si vous retournez le livre, vous obtenez un oiseau de papier. Sous l’aile droite, donc, la jeunesse, notre jeunesse, même, car Olivier de Solminihac mène son récit à la première personne du pluriel. Les narrateurs sont des enfants que leurs parents élèvent dans la religion catholique, qui écoutent Noir Désir et partent en séjour linguistique avec le collège. « Nous avons soif, mais nous ne savons pas de quoi », confessent-ils dans un ­récit ténu, épuré, galopant sur les années qui passent. Une petite soeur trépasse, mais la vie court toujours, même dans un trou noir, et la conscience du monde se développe.

Egalement auteur de livres pour la jeunesse (un très bel album, Le Bateau de fortune, sur le désoeuvrement provisoire d’une famille qui a oublié toutes ses affaires de plage à la maison, paraît simultanément aux éditions Sarbacane), Olivier de Solminihac a le même sens de la temporalité que les enfants, ballottés entre l’urgence et l’éternité.

Dans la deuxième partie du livre, le « nous » s’écaille, on glisse sur la pente descendante de l’après-quarante ans, la solitude dans la foule devient plus flagrante, et on se raccroche au passé, le sien ou celui des autres, entrevu sur une plaque commémorative de la Seconde Guerre mondiale. L’homme, au fond du « nous », se fait de plus en plus petit, jusqu’à disparaître. Il devient l’autre, délivrant son expérience, pleine de sagesse et d’enseignement. Un roman énigmatique sur la condition humaine, tout en humilité et chuchotements, à la manière de Georges Perec. — Marine Landrot

 

Ed. de l’Olivier, 144 p., 15 €.

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