Les Résidents

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Les Résidents

Dans le dictionnaire littéraire des idées reçues, on pourrait lire, à l'entrée « Dantec, Maurice » : « Réinventeur de la littérature de genre des années 1990, devenu illisible en sombrant dans le délire mystico-facho ». Un conflit juridique avec son éditeur, des déclarations islamophobes, son affirmation comme « catholique futuriste » et « chrétien sioniste » avaient enterré la réputation de l'auteur de Babylon Babies (1999). Mais voici que, depuis quelques mois, la rumeur enflait : débarrassé de ses outrances tant stylistiques qu'idéologiques, Dantec allait nous revenir, à nouveau lisible et fascinant…

En terminant les quelque 650 pages des Résidents, on s'ébroue : le voyage a été à la fois long, passionnant, épuisant, risible, obscur, et il faut quelques jours pour qu'en retombent les scories et qu'en surviennent les émerveillements. Sharon est devenue tueuse après un viol collectif ; Novak est coupable d'un massacre dans son lycée ; Vénus, esclave sexuelle de son père, s'est enfuie de la prison où il l'a séquestrée pendant quinze ans… Tous trois cheminent vers la même mystérieuse retraite. Cette première partie du roman est du meilleur Dantec : le déluge des mots nous emmène au fond de l'horreur, leur musique crée une ambiance presque hallucinatoire, la souffrance des personnages y est à la fois odieuse et ambiguë, les détruisant et les régénérant dans le même élan. La suite voit nos trois héros comprendre que leur destin a été manipulé, se heurter à un projet apocalyptique de la CIA, et retrouver leur liberté sur une route mythique. La langue devient plus complexe, plus technologique – et, avec elle, ce qui intrigue devient verbeux, le complexe se révèle obscur et l'inspiré, incohérent. Sous ses dehors de techno-thriller très noir et ses oripeaux technologico-abscons, Les Résidents apparaît alors comme un digest de l'œuvre de Dantec, sûrement apte à séduire ses fans, mais impuissant à convaincre les autres.

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