Les Âmes baltes. Périple à travers l’Estonie, la Lettonie et la Lituanie

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Les Âmes baltes. Périple à travers l’Estonie, la Lettonie et la Lituanie

Au cours des années 2000, l’écrivain néerlandais Jan Brokken a parcouru les trois pays baltes : la Lituanie, la Lettonie et l’Estonie. Le golfe de Riga, point de départ de son périple, aurait presque été à lui seul l’indice que l’histoire récente avait marqué à jamais cette région septentrionale : une partie des eaux était, en effet, encore parsemée des mines de la guerre froide. Mais Jan Brokken a sillonné aussi les villes et les campagnes, passant des forêts de frênes de Lituanie à toutes les petites gares, auberges, châteaux ou manoirs qui témoignent encore des anciens empires comme des plus récentes invasions.

Dans ces pays, note l’auteur, l’âge d’un individu n’a pas la même signification que dans le sud de l’Europe : il indique le régime sous lequel il a grandi. Polonais, Allemands, Russes ou Soviétiques, Lituaniens, Estoniens ou Ukrainiens se sont parfois affrontés, puis mélangés, sans jamais oublier qui ils étaient ni qui ils sont encore, les nationalismes observant des courbes ascendantes ou descendantes selon les époques. L’Histoire, loin d’être ici une démonstration, est d’abord une série de traces, parfois invisibles, témoignant de ce qui a disparu et de ce qui perdure. Les Juifs de Bia?ystok, exterminés par les Allemands en 1941, mais aussi les descendants de l’aristocratie germano-balte ou les artistes d’aujourd’hui sont les âmes ­errantes ou encore vivantes de ce livre qui traverse les décennies. Romain ­Gary, de son vrai nom Roman Kacew, de Vilnius, Hannah Arendt ou Emmanuel Kant, de Königsberg, devenue ­Kaliningrad, revivent sous la plume de Jan Brokken, écrivain voyageur à l’affût de tous ceux qui incarnent ces territoires dont les noms nous semblent des entités mystérieuses. « Dans les pays Baltes, écrit Brokken, chaque communauté a ses héros, ses héroïnes, ses martyrs et ses bourreaux. Le bien et le mal se confondent. La vérité de l’un fait la colère, le désespoir et le malheur de l’autre. » Il rappelle ainsi l’histoire de Loreta Asanaviciuté, jeune femme de 22 ans qui, à l’aube du 13 janvier 1991, fut écrasée à Vilnius par un des chars soviétiques qui réprimaient les manifestations d’indépendance. Une âme balte parmi d’autres, qui a fait l’Europe d’aujourd’hui. — Gilles Heuré

 

Baltische Zielen, traduit du néerlandais par Mireille Cohendy Ed. Denoël 400 p., 20 €.

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