Le manteau de Greta Garbo

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Le manteau de Greta Garbo

Greta Garbo est morte en 1990 — vingt ans plus tard, ces jours de décembre 2012 où, à Los Angeles, sa garde-robe fut vendue aux enchères, « pulvérisée, éparpillée aux quatre coins du monde », n’est-elle pas « morte une deuxième fois » ? C’est l’intuition initiale de ce beau livre, le premier de Nelly Kapriè­lian, laquelle assista à la vente comme à une cérémonie mystique cruelle, morbide, sorte de dépeçage en règle de la dépouille de la star et de dispersion de ses reliques — ces milliers de vêtements, robes, tailleurs, souliers, accessoires… que Garbo accumulait dans ses armoires pour généralement ne jamais les porter. De ce démembrement, l’auteure elle-même rapporta un trophée : le lot 492 de la vente, un manteau rouge cerise — et, lorsqu’elle le revêt, le miroir lui renvoie l’image d’« une femme portant la dépouille sanguinolente d’une autre femme »

Garbo et son manteau ne sont que l’amorce — et le fil d’Ariane — de ce texte d’une parfaite singularité, tout ensemble vif et élégant, méditatif et précis, fragmenté et d’une impeccable cohérence, qui, à travers le prisme du rapport au vêtement, soulève une succession d’hypothèses et de réflexions stimulantes, parfois vertigineuses, sur la féminité, l’incarnation, les apparences et ce qu’elles dissimulent ou révèlent, l’identité et ses métamorpho­ses, les fictions de soi par lesquelles chacun se construit ou s’engendre. Pour appuyer sa quête, Nelly Kapriè­lian convoque mille témoins, de Dietrich à Oscar Wilde, de Truman Capote à David Bowie, de Dita Von Teese à Huysmans… Mais, c’est lorsqu’elle les rejoint dans le livre, lorsqu’elle décide d’en devenir à son tour un personnage, que se révèle l’enjeu profond, intime et sensible de sa méditation — la démarche spéculative se muant alors en un geste littéraire audacieux, grave, authentique. — Nathalie Crom

 

Ed. Grasset 288 p., 18,50 € En librairie le 27/8.

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