L’Art de la thérapie

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L’Art de la thérapie

« Nous sommes les dépositaires de secrets […] certains me font mal […] certains résonnent en moi […] d’autres m’attristent quand je vois comment une vie entière peut être consumée par la honte et l’in­capacité de se pardonner à soi-même », confie Irvin Yalom. Pour L’Art de la thérapie, recueil de quatre-vingt-cinq conseils « à la nouvelle génération de thérapeutes et à leurs patients », il s’appuie sur un demi-siècle de savoir-faire consacré à la pratique de « guérisseur » et à la recherche d’un soulagement ­durable à la souffrance humaine.

Né à Washington en 1931, ce fils d’épiciers juifs russes devient professeur de psychiatrie à Stanford. Et plonge dans la philosophie : « Les psychothérapeutes ne peuvent pas se permettre d’ignorer les grands penseurs qui ont conclu qu’apprendre à bien vivre est apprendre à bien mourir. » Il s’empare de Nietzsche, Schopenhauer, Spinoza ou Epicure pour ses « psy-fictions ». Car l’art de la thérapie n’est pas son seul talent : il a fait de « l’odyssée thérapeutique » avec ses patients la matière de thrillers psychologiques revigorants (1) . Mais L’Art de la thérapie, sorti en 2001 et traduit aujourd’hui en français dans une version actualisée, occupe une place à part. A la fois manifeste psychanalytique et interpellation philosophique, florilège d’anecdotes vécues et confession essentielle, il se ­situe à un moment fort de la vie du Dr Yalom. D’abord, ses patients commencent à faire de drôles de rêves où son cabinet se transforme en… « bibliothèque commémorative ». Il y a urgence de transmission ! Et puis l’époque est à la rentabilité. Le système privilégie les thérapies courtes, la psychopharmacologie, et les neurosciences explosent. A tous, le père de la thérapie existentielle proclame : toutes nos disciplines sont légitimes ! Au même titre que « la psychothérapie existentielle n’est pas une branche autonome de la psychothérapie [mais] veut accroî­tre la sensibilité de tous les psychothérapeutes […] au poids des questions existentielles dans le désespoir humain ».

Or ces questions — l’angoisse de la mort, la soif de sens, le vertige de la liberté, la misère de l’isolement — ne peuvent être transmuées qu’au fil d’un lent « compagnonnage » où chacun, « guérisseur » et patient, se dévoile en confiance, vit « l’ici et le maintenant » de la séance, explore le « faiseur de rêves » qui est en lui. Pour cela, le thérapeute ne joue ni à l’« archéologue raclant la poussière accumulée » avant la relation analytique ni au « magicien d’Oz » providentiel. A l’image de Socrate, il n’est qu’« une sage-femme permettant la naissance de quelque chose de neuf, d’exaltant », qui, par ses questions, aide l’autre à accoucher de lui-même. « Deviens qui tu es… » : c’est la phrase de Nietzsche qu’Irvin Yalom murmure au patient et au thérapeute qui sont en nous, à travers une écriture limpide, colorée, malicieuse, qui étincelle d’évidence. Et son livre, traversé de bienveillance éclairée, continue de nous habiter en secret, de nous faire exister.

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