L’Appel du coucou

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L’Appel du coucou

Evoluer dans un genre littéraire autre que son registre habituel et publier alors sous pseudonyme, les écrivains anglo-saxons sont familiers de ce type de dédoublement de la personnalité. Ainsi, c’est du nom de Dan Kavanagh que Julian Barnes signe ses romans policiers, et sous celui de Benjamin Black que le grand John Banville fait paraître les siens – pour ne citer que ces deux-là. Lorsqu’en avril dernier L’Appel du coucou est arrivé dans les librairies britanniques, il s’est trouvé quelques journalistes affûtés pour supputer que ce polar était trop maîtrisé pour être l’oeuvre du parfait inconnu, parfait débutant Robert Galbraith. Trois mois – et quelques articles plutôt élogieux – plus tard, le Sunday Times révélait après enquête que, derrière l’imaginaire Robert Galbraith, se cachait J.K. Rowling, la féconde génitrice de Harry Potter. Passée, quelques mois plus tôt, de la littérature jeunesse à celle pour adultes – disons, des enchantements, certes parfois féroces, de Poudlard à la réalité sinistre d’une société anglaise économiquement et moralement naufragée, toile de fond d’Une place à prendre (éd. Grasset, 2012).

Après ce roman de correcte facture, inscrit dans la plus pure tradition réaliste anglaise, c’est donc au roman policier que J.K. Rowling s’est secrètement essayée. Et autant le dire d’emblée : à cet exercice, elle se montre assez épatante. S’emparant des codes du genre, sans chercher à les révolutionner, pour plus modestement les revisiter avec adresse et finesse. A travers l’enquête sans temps morts que mènent le privé Cormoran Strike – un colosse dépressif terriblement attachant, vétéran de l’Afghanistan, d’où il est revenu amputé d’une jambe – et son assistante en intérim, la discrète et maligne Robin, autour de la mort d’un top-modèle, prétendument suicidée, L’Appel du coucou dresse, l’air de rien, une sorte de radiographie de la société anglaise d’aujourd’hui, tout en pointant l’anomalie bien contemporaine de l’hypermédiatisation. L’ensemble est extrêmement bien mené, franchement distrayant, efficace et incarné. En un mot : réussi. — Nathalie Crom

 

L’Appel du coucou (Cuckoo’s Calling), de Robert Galbraith Traduit de l’anglais par François Rosso Ed. Grasset, 576 p., 21,50 €.

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