L’Adjacent

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L’Adjacent

Autant qu’un grand roman, L’Adjacent est une pièce de plus au vaste puzzle que construit depuis des années le Britannique Christopher Priest. Ceux qui l’ont déjà lu y retrouveront des sujets (la magie, l’aviation, la Seconde Guerre mondiale…) et des thèmes (le voyage dans le temps…) de ses précédents ouvrages. Les autres auront là un « digest » idéal pour se plonger dans l’oeuvre de l’un des plus passionnants auteurs de SF. L’anecdote de départ de ce faux thriller est simple : dans un futur proche, une infirmière, Melanie, disparaît en Anatolie. Au sol ne reste qu’un triangle noir, le même qui a été découvert dans la République islamique de Grande-Bretagne après un attentat destructeur à Londres. Quelle arme est responsable des deux événements ? Tibor Tarent, photographe free-lance et mari de l’infirmière, cherche à comprendre…

Après cette première partie, on change d’époque et de héros : une histoire durant la Première Guerre mondiale, une autre en 1943, une troisième enfin dans l’archipel du Rêve, lieu central de l’imaginaire de Priest, déjà exploré dans Les Insulaires. Mais les nouveaux récits semblent répéter le premier, développer ses figures, évoquer en parallèle des romances proches de celle de Tarent et Melanie. Sont-ils tous sous le coup de « l’adjacence », qui paraît multiplier les réalités ? On ne le saura jamais vraiment. L’élégance de Priest est là : dans ce refus de donner clés en main un livre dont le mystère se résoudrait de lui-même dans les dernières pages, dans le choix qu’il offre au lecteur de laisser son imagination prendre la suite de celle de l’auteur. Frustrant ? Au contraire, follement excitant. On ne perd jamais pied dans cet univers complexe et allusif, dont l’écriture précise et fluide maintient en permanence l’intérêt. Proche de J.G. Ballard pour la rigueur stylistique et de Philip K. Dick pour cette idée que la réalité n’est jamais ce qu’elle pense être, L’Adjacent fait aussi penser à ces romans gigognes du type Manuscrit trouvé à Saragosse, où les histoires se répondent les unes aux autres et construisent un univers commun. Un livre qui ouvre une réflexion fascinante sur la nature de l’illusion. — Hubert Prolongeau

 

The Adjacent, traduit de l’anglais par Jacques Collin, éd. Denoël, coll. Lunes d’encre, 552 p., 24,90 €.

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