La Conversation comme manière de vivre

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La Conversation comme manière de vivre

Qu’est-ce qui rapproche des ouvrages aussi différents que les Essais de Montaigne, les Mémoires de Saint-Simon, les différentes Correspondances de Flaubert et Les Aventures d’Alice au pays des merveilles de Lewis Carroll ? Signés par des « écrivains oraux », ils affichent « autant de styles variés pour dire la richesse des tons, des intonations, du souffle de la parole et des différents bruits émis pour se faire comprendre ».

C’est l’idée défendue par le philosophe Ali Benmakhlouf, dans La Conversation comme manière de vivre. La conversation suppose la présence d’un interlocuteur : l’échange des mots devient un échange des corps ; la parole se fait relation à l’autre. Respiration. La « parole est moitié à celui qui parle, moitié à celui qui l’écoute », synthétisait Montaigne, qui écrivait : « Je parle au papier comme je parle au premier que je rencontre »… Flaubert, de son côté, « gueulait » tout haut ses phrases, jusqu’à s’érailler la voix.

Cheminant avec aisance de la philosophie arabe à la philosophie analytique, Ali Benmakhlouf affiche une liberté qui convient bien à son thème. Si Montaigne (auquel il avait consacré un essai en 2008) lui sert de fil rouge, l’auteur croise aussi la route de Roland Barthes, d’Al-Fârâbî, de Marcel Proust, de Ludwig Wittgenstein ou de Stanley Cavell. Il avance sur la ligne oblique qui relie les massifs de l’écriture et de l’oralité. Pour explorer une voie qui comporte toujours un risque, une déconcertation possible, puisque la conversation ne se réduit jamais au sujet abordé, à la différence de ce qu’impose la « bonne rhétorique ». Dans la conversation, les « mots sont mouvement et action », note Benmakhlouf. Converser, c’est voyager, écrivait Descartes… — Juliette Cerf

 

Ed. Albin Michel, 256 p., 16,90 €.

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