La Colonne. Tome 1 : Un esprit blanc

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La Colonne. Tome 1 : Un esprit blanc

L’épisode ne fit pas de vagues. On l’oublia. A l’aube du XXe siècle, le massacre de plusieurs centaines ou milliers d’Africains dans une expédition militaire, c’était « le prix à payer pour apporter la civilisation à des nègres et agran­-dir l’empire français » (1) . La colonne commandée par le capitaine Voulet ­(rebaptisé, ici, Boulet) et le lieutenant Chanoine (Lemoine) est partie de Dakar en janvier 1899 pour une ultime mission au Tchad. Composée de quel­que trois cents hommes, des tirailleurs et supplétifs africains, elle doit trouver sur place les moyens de sa survie. Pillages, exécutions sommaires et massacres collectifs vont jalonner la très peu glorieuse expédition. En exhumant cette histoire méconnue, Christophe Dabitch et Nicolas Dumontheuil glissent, au passage, une interrogation latente : comment les soldats africains ont-ils pu perpétrer de sang-froid les pires atrocités sur d’autres Noirs ? ­Manière de revisiter les clichés du colonialisme et de la bonne conscience qui l’accompagnait.

On ne saurait mieux en démontrer (et démonter) les effets pervers. Ils le font par l’absurde. Le scénario de Dabitch s’articule sur le dialogue entre un des tirailleurs, Souley, et un « esprit blanc », qui n’est autre que l’esprit de la colonne, campé en ludion virtuel, un brin cynique, d’une lucidité ironique. A rebours d’un plat réalisme se déploie ainsi une épopée tragi-comique électrisée par le dessin de Nicolas Dumontheuil. Depuis Big Foot notamment (trois tomes, 2007-2008), on sait que personne ne réussit comme lui à débusquer les névroses, les faiblesses, sans oublier la stupidité satisfaite, d’un personnage sous les (trompeuses) apparences d’une caricature en sur­régime convulsif. Délié, mobile, étourdissant, son trait est corrosif : il déjoue les pièges de l’emphase pour mieux enfoncer le clou de cette aventure dramatique, si irrésistiblement évocatrice d’une époque.

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