J’aurais voulu pouvoir vous les montrer

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J’aurais voulu pouvoir vous les montrer

Figure tutélaire du cinéma indien, romancier, graphiste, compositeur, Satyajit Ray (1921-1992) a aussi beaucoup écrit sur le cinéma. Son fils Sandip a réuni vingt-deux textes du cinéaste bengali, inédits en France, illustrés par une sélection de ses photos, de ses affiches et de ses dessins (les portraits de Picasso et de John Ford valent le coup d’oeil). Formidable conteur à l’écran, Satyajit Ray l’est aussi à l’écrit quand il livre ses souvenirs très drôles de festivalier à Moscou ou à Venise. Et il peut se montrer un critique féroce quand il analyse Blow up (« J’ai rarement vu un film à ce point dépourvu de « mouvement » intérieur » — et bing pour Antonioni !). Mais l’essentiel de l’ouvrage est constitué de réflexions à la fois humbles et lucides sur le métier de cinéaste, riches en considérations techniques et nourries par l’expérience de mille embûches surmontées.

Contrairement à sa réputation d’auteur pour l’élite, Ray rappelle qu’il a toujours conçu ses films en pensant prioritairement au public. « L’histoire du cinéma est remplie d’exemples d’artistes qui prennent conscience qu’ils ont besoin de communiquer avec un vaste public et qu’ils ne perdent rien dans l’affaire », explique le réalisateur de Charulata aux étudiants du Film and Television Institute of India en 1974. Quatorze ans plus tôt, il notait avec humour : « Si l’on garde à l’esprit que le talent est une chose rare à toute époque et en tout lieu, la prépondérance des mauvais films n’est pas une chose qui doit nous alarmer ou nous surprendre. Ce qui est vraiment ­surprenant, c’est que, malgré la complexité et la précarité du long processus nécessaire à la réalisation d’un film, et malgré les écueils qui parsèment le chemin du ­cinéaste, on parvienne après tout à faire de bons films. » Une belle ­leçon de cinéma. — S.D.

 

Deep Focus, reflections on cinema, traduit de l’anglais (Inde) par Christophe Jouanlanne, éd. G3J, 154 p., 29 €.

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