François Mitterrand

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François Mitterrand

Pourquoi lire cette nouvelle biographie de François Mitterrand ? Parce qu’il est le dernier roi de France. Et parce que le biographe est Michel ­Winock qui, avec le recul de l’historien, reprend tous les éléments du dossier. Plus secrètement, on relit aussi le trajet de Mitterrand, figure centrale de la vie politique française du second XXe siècle, par désir de politique et pour retrouver des controverses, des oppositions et des contours idéologiques qui se sont singulièrement affaissés ces dernières années. Le fait est que le parcours de François Mitterrand est plus passionnant que celui des hommes politiques d’aujourd’hui, qui passent des bancs de l’ENA aux couloirs du pouvoir.

Michel Winock n’est pas un thuriféraire idolâtre, non plus qu’un un adversaire compulsif. Aucune nostalgie donc, mais, dans le style qu’on connaît à l’auteur, une écriture passionnante et un récit scrupuleusement rivé aux faits. Et que de faits, quand on y songe ! Voilà un jeune étudiant sympathisant des Croix-de-Feu, donc d’une droite qui ne franchit pas les lignes qui la séparent du fascisme pur et dur, puis un prisonnier de guerre qui deviendra « vichysto-­résistant ». Une position pas évidente à comprendre, sauf si l’on se convainc que les adhésions politiques empruntent parfois des chemins biscornus. « Renard » plutôt que « lion », l’animal politique gravit les échelons du pouvoir, ministre habitué des cabinets de la IVe République et opposant au format d’une Ve dans laquelle il se logera pourtant sans état d’âme. Le « Florentin », lecteur de La Bruyère et de Chamfort, sait cloisonner ses vies privée et publique, à la fois fourbe en politique et fidèle en amitié, stratège de sang-froid et parfois naïf — comme dans cette affaire dite de l’Observatoire, en octobre 1959, dont beaucoup prédirent alors qu’elle allait mettre fin à l’ascension du brillant orateur. Mais les facultés de rebondir de cet homme ne cessent d’étonner.

Et il faut de la souplesse, pour que, anticommuniste, il prône l’union de la gauche avec un PCF qu’il embrassa pour mieux l’étouffer. Affaires, secrets d’Etat et changements de cap ont jalonné son itinéraire. Classique en politique ? Les plus prompts à la mansuétude pointent pourtant ce qui ne peut passer : son amitié avec René Bousquet, secrétaire général de la police en 1942, organisateur de la rafle du Vél’d’Hiv. L’Histoire, encore, qui secoue la figure historique dont Michel Winock retrace avec tant de brio les différentes facettes.— Gilles Heuré

 

Ed. Gallimard, coll. Biographies, 428 p., 25 €.

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