Fenêtres sur rue

Ajouter un commentaire

Fenêtres sur rue

En observant l’immeuble d’en face, il y a des chances de voir apparaître aux fenêtres des éclats furtifs de scènes qui finissent par suggérer une intrigue, voire un meurtre. La scénographie imaginée par Rabaté renvoie évidemment à Fenêtre sur cour, de Hitchcock, quintessence de l’art d’un maître voyeur. L’hommage est direct – sir Alfred passe, silhouette fameuse, comme dans ses films –, mais plus que de suspense, il s’agit ici d’un irrésistible exercice de sociologie ludique. Soit un plan large et fixe sur une dizaine de fenêtres, plus une laverie automatique et un bistrot : décor unique pour une représentation en vingt tableaux vécus, sans paroles. Vingt moments, de jour et de nuit, de la vie quotidienne.

A mesure que l’on s’y immerge, les simples silhouettes deviennent des personnages, et ces fragments d’existences s’ordonnent en un bouquet de trajectoires, simples mais pas banales. Rabaté les distille avec un sens aigu de la dra­maturgie, d’abord, et du jeu, ensuite. Séduisant jeu de piste, qui par la construction même de ce beau livre, un dépliant en accordéon recto (les matinées)/verso (les soirées), incite le lecteur à prendre le temps de repérer les indices où se dévoilent les intimités suggérées, à en combler lui-même les blancs, les non-dits, pour se raconter, au finale, l’histoire du quartier qui lui convient. Si M. Hulot y glisse sa dégaine, ce n’est pas par hasard : sur ce microcosme attachant, dépeint en tableaux d’une élégance de touche légère, il flotte comme un air de burlesque tatiesque. L’autre influence tutélaire de Rabaté.

Commandez le livre Fenêtres sur rue

Laisser une réponse