Fin des années 1960. Le Japon, comme le reste du monde, subit une vague de contestation. Secouée, la société conservatrice craque et se fendille, des idées nouvelles s'imposent, les jeunes n'ont qu'une peur : ressembler à leurs parents ! Dans ce terreau fertile, un manga plus libre et plus adulte s'épanouit, et les maîtres du genre ne sont pas les derniers à s'en saisir. Moins connu qu'Osamu Tezuka en Occident, le génial et prolifique Shotaro Ishinomori (1938-1998) dessine tous azimuts, notamment pour les magazines masculins, Playboy et consorts, qui viennent de voir le jour. Une seule contrainte : parler de sexe et mettre en scène des situations coquines. Ishinomori, qui, à l'évidence, adore regarder les femmes autant que les croquer, ne se fait pas prier ; mieux, il se pique au jeu.
Réunies pour la première fois en recueil, ces quinze nouvelles graphiques donnent un aperçu de son imaginaire débordant. Extraterrestres, savants fous, androïdes et psychédélisme côtoient récits historiques, drames psychologiques, chroniques et souvenirs personnels de l'auteur. Un mélange détonant qui brasse aventures épiques, SF, humour et introspection. Frais, stylisé, parfois explicite, le dessin n'est jamais complaisant. Rien à voir avec l'outrance fantasmatique des estampes de l'ukiyo-e (XVIIe-XVIIIe siècles), même si Ishinomori consacre l'une de ses histoires les plus réussies à l'un des maîtres du genre, Utamaro. Témoignage d'une époque qui paraît bien innocente, Eros X SF lève aussi le voile sur la part obscure de ce formidable créateur.
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