Éloge du peu

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Éloge du peu

 

Les deux livres ont presque quatre-vingt-cinq ans d’écart, et pourtant ils semblent jumeaux. Commençons par le plus récent, Eloge du peu, écrit par un moine zen japonais de 38 ans, Ryûnosuke Koike. L’auteur confesse son passé de « sale type, parfaitement méprisable », de « jeune bon à rien dominé par l’orgueil », obnubilé par l’acquisition des derniers vêtements à la mode « pareils à une armure protégeant mon ego malingre ». Ce n’est pas son repentir qui fait l’originalité de son livre, mais la solution qu’il propose : apprendre à jeter. Très convaincante est sa démonstration des bienfaits de l’élimination volontaire de tout ce qu’on accumule en vain, et dont la possession laisse une trace encombrante dans l’esprit, même quand les objets ont été relégués aux oubliettes. Pour Koike, la sérénité vient quand le mental cesse d’être un entrepôt d’achats inutiles et peut se consacrer à la compréhension de ses besoins réels.

En 1933, Jun’ichirô Tanizaki publiait Eloge de l’ombre, devenu un grand classique de la littérature japonaise, annonciateur de bien des maux d’aujourd’hui. Le texte est republié sous le titre Louange de l’ombre, dans une nouvelle traduction fluide et très vivante, soucieuse de retrouver la décontraction de son auteur, convaincu que « ce qui brille fort ne procure pas l’apaisement de l’esprit ». Pour Tanizaki, préserver l’ombre et le vide autour de soi permet de vivre dans un monde « conçu pour la paix de l’âme ». Les deux ouvrages se complètent et se répondent. Tout est question de style. Clair et précis, le premier s’apparente à un guide pratique de survie, tandis que le second s’honore d’une exigence d’écriture régénératrice. — Marine Landrot

 

Eloge du peu (Bimbô nyûmon), traduit du japonais par Myriam Datois-Ako, 192 p., 18,50 €.

Louange de l’ombre (In’ei raisan), traduit du japonais par Ryoko Sekiguchi et Patrick Honnoré, éd. Philippe Picquier, 112 p., 13 €.

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