De l’univers clos au monde infini

Ajouter un commentaire

De l’univers clos au monde infini

« Les Blancs ne craignent pas, comme nous, d’être écrasés par la chute du ciel. Mais, un jour, ils la redouteront peut-être autant que nous », prophétise Davi Kopenawa, chaman et leader politique Yanomani, dans son autobiographie La Chute du ciel (éd. Plon, 2010). Ce jour est-il en train de poindre ? La crise écologique, en tout cas, resserre chaque jour un peu son étreinte, et n’en finit plus d’interroger notre « modernité ». Avec ce paradoxe majeur : alors que nous disposons d’un éventail inégalé d’outils scientifiques pour appréhender et agir sur cette crise, nous y restons globalement insensibles. Nous demeurons ces « mangeurs de terres », comme disent les Yanomani, incapables de modifier notre incessante activité de déplacement, transformation, creusement de la terre… Et s’il nous fallait, aussi, inventer de nouveaux récits, des imaginaires capables de nous faire habiter autrement, voire rêver, cette Terre fragile et enfiévrée ?

Tel est le postulat du passionnant ouvrage dirigé par la philosophe Emilie Hache. S’y trouvent rassemblées certaines des voix les plus créatives de la pensée écologique, historiens comme Dipesh Chakrabarty ou Christophe Bonneuil, philosophe comme Isabelle Stengers, anthropologues comme Eduardo Viveiros de Castro ou Bruno Latour. Qu’ils la critiquent ou pas, tous empoignent la notion d’Anthropocène, cette nouvelle ère géologique, ainsi désignée par le Nobel de chimie Paul Crutzen, au cours de laquelle l’espèce humaine est devenue la force géophysique qui modifie le plus la planète. L’Anthropocène, autrement dit « le concept philosophique, religieux, anthropologique et politique le plus décisif jamais produit comme alternative aux idées de modernité », selon Bruno Latour. Et pour Eduardo Viveiros de Castro, « un problème essentiellement métaphysique » : « la fin du monde ». Avec la philosophe Déborah Danowski, l’anthropologue brésilien propose une fascinante incursion dans les mythologies actuelles de la fin du monde, qu’elles viennent des Occidentaux, telle la « Singularité » du penseur pop Ray Kurzweil (un des ingénieurs en chef de Google), ou des Amérindiens, qui s’y connaissent en « fin du monde » tant y ont-ils déjà été confrontés. Pour Eduardo Viveiros de Castro, « maîtres du bricolage techno-primitiviste et de la métamorphose politico-métaphysique », ces derniers « sont l’une des chances possibles, en vérité, de la survie du futur ».

Commandez le livre De l’univers clos au monde infini

Laisser une réponse