Hollywood et Broadway. Los Angeles et New York. Deux lieux mythiques, situés sur les deux côtes opposées des Etats-Unis. On connaît pourtant mal les liens, les transferts qui se sont opérés de l’un à l’autre, si l’on excepte le genre des comédies musicales. Professeur d’études cinématographiques à l’université Paris-VIII, Marguerite Chabrol explore cette relation productive entre planches et septième art américains. Son essai d’histoire culturelle, De Broadway à Hollywood, analyse à partir de nombreuses sources (cent quatre-vingt-quatre films), de façon assez technique (il y manque un peu de chair…), les différentes stratégies des studios pour intégrer le théâtre new-yorkais à leurs productions, sur la période qui va des années 1930 jusqu’au milieu des années 1960 — moment où le cinéma classique explose, cédant la place au Nouvel Hollywood. Broadway rassemble alors théâtre populaire (comédies, musicals), théâtre politique (Group Theatre), pièces d’auteurs (tels Eugene O’Neill, William Inge ou Tennessee Williams). « Le théâtre se révèle être un atout pour la conquête des publics : il est à la fois un gage de qualité et un modèle de spectacle de masse, le succès préalable des pièces apportant à l’industrie cinématographique des garanties sur le plan commercial. »
Mine de sujets sociaux, de critiques politiques ou d’audacieuses intrigues sexuelles, le théâtre permet aussi aux studios de contourner les règles du code Hays, le code de censure qui a régi Hollywood de 1934 à 1966. Ainsi, The Front Page, pièce de Ben Hecht et Charles MacArthur, grand succès de la fin des années 1920, fut l’objet de trois adaptations cinématographiques : par Lewis Milestone en 1931, Howard Hawks en 1939, puis Billy Wilder en 1974. Satire des pratiques journalistiques, menace communiste, allusions homosexuelles, etc., autant de strates dont le cinéma saura faire son miel. — Juliette Cerf
CNRS éditions, 400 p., 25 €.
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