Chiisakobé

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Chiisakobé

Japon, de nos jours. Ancien routard tendance Into the wild, Shigeji revient dans l’archipel après le décès accidentel de ses parents. Taiseux, peu conformiste, un rien décalé, le trentenaire, contre toute attente, reprend la petite entreprise familiale de charpenterie-menuiserie. Le célibataire, qui peine ­à trouver ses marques avec les employés, recueille sous son toit, par le jeu des circonstances, une poignée d’orphelins, ainsi que Ritsu, une jeune femme qui leur sert de gouvernante…

Etude de moeurs, huis clos, roman psychologique, fresque sociale, saga familiale, romance ? Chiisakobé est un authentique manga, mais le cataloguer relève de l’impossible. Difficile également d’expliquer comment opère sa magie, pourquoi cette histoire au rythme lent, sans grands événements ni effets de manche graphiques, attrape l’attention du lecteur pour ne plus la lâcher. Certes, la puissance narrative du manga n’est plus à démontrer ; bien sûr, il y a aussi les cadrages singuliers de Minetarô Mochizuki, qui préfère donner la parole aux pieds ou aux hanches des personnages plutôt qu’à leurs visages, son dessin élégant aux lignes épurées, mais là n’est pas l’essentiel. En adaptant à l’époque contemporaine ce roman de Shûgorô Yamamoto (1903-1967) qui se déroule pendant la période Edo (XVIIe-XIXe siècle), le dessinateur est parvenu à capter et transmettre quelque chose de l’éternel nippon. ­Cet art de la retenue, du moment suspendu — le « ma » cher au cinéma d’Ozu, qui rend les silences éloquents et donne davantage de poids aux non-dits qu’aux paroles. Mochizuki parvient aussi à montrer la poésie du quotidien si chère aux Japonais, la beauté qui se cache dans les tâches domestiques, les petits riens où l’amour et l’affection se nichent, le langage silencieux du bento, de l’emballage, des petites attentions qui en disent si long… Un enchantement subtil et apaisant dont le troisième volume vient tout juste d’être publié. — Stéphane Jarno

 

Traduit du japonais par Miyako Slocombe, éd. Le Lézard noir, 3 vol., 230 p., 15 € chacun.

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