Arden

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Arden

D’abord, on est saisi par l’apparent classicisme de la forme : ce foisonnant récit pseudo-historique, admirablement maîtrisé, dans ce flamboyant royaume d’Europe centrale, la Marsovie… Puis apparaît la dérision, la dinguerie… Si la peste brune nazie menace en effet d’envahir notre Monaco des Carpates, Alexandre de Roucoule et son intime ami Salomon Lengyel, sortes de Bouvard et Pécuchet révisités par Eugène Labiche – à moins que ce ne soit par le surréaliste Raymond Roussel –, ne s’y intéressent guère. Depuis 1917, ils concoctent sans se lasser des dizaines d’opérettes « immontables » et « immontées », car les deux compères n’arrivent jamais à les finir… Alors Salomon continue de vendre sans y croire de vieux costumes démodés dans sa boutique décatie, tandis qu’Alexandre, irrépressible séducteur, dirige en danseur mondain un vieux palace qui fut sanatorium, auprès d’une épouse neurasthénique, ex-infirmière reconvertie dans l’astrologie. La vie des deux excentriques pourrait évidemment ressembler aux opérettes qu’ils écrivent, si l’antisémitisme ne venait bientôt menacer Salomon et sa fille, Esther, dont tombe inévitablement amoureux Alexandre…

Dans ce très étonnant premier roman, burlesque et tragique à la fois, érudit et ironique, Frédéric Verger mêle avec élégance tons et degrés, sens et contresens, brouille les pistes pour dire les cacophonies et absurdités de l’Histoire. L’héroïsme se cache plutôt ici dans les activités futiles et vaines d’Alexandre et Salomon, la grandeur et la vérité dans l’illusoire et le faux.

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