Alma Zara

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Alma Zara

Les lecteurs qui connaissent Alain Fleischer — auteur d’une cinquantaine de livres, essais et romans, et aussi cinéaste et photographe — ne seront pas étonnés de retrouver dans Alma Zara l’écriture qui est sa marque de fabrique, à la fois envoûtante et constamment à la recherche d’un trompe-l’oeil dans lequel l’auteur est son propre spectateur. Voici Damian, petit garçon de 7 ans, réfugié en 1944 dans un orphelinat, en Transylvanie, et subjugué par une jeune femme de 20 ans qui se prénomme Alma, échappée du camp de Terezín et symbolisant à ses yeux une féminité encore inaccessible. De sept ans en sept ans, il la retrouve aux quatre coins du monde, avec des prénoms différents, devenue son amante mais toujours fuyante, disparaissant avec la promesse de le retrouver. Damian grandit, puis vieillit, jeune soldat en Allemagne d’abord, puis directeur d’un laboratoire, gardant le contact avec sa tante Zsuzsa, seul repère dans sa vie itinérante.

C’est une quête multiple et perpétuelle que poursuit Damian : celle de la jeune femme violoniste qui change ses prénoms au gré du curieux abécédaire que propose Fleischer ; celle de sa propre identité, lui qui entend les sons de la langue hongroise et se souvient des paroles de son vieux maître Abba, professeur omniscient. Une quête que poursuit aussi Alain Fleischer, de roman en roman, interrogeant inlassablement l’érotisme et ses figures esthétiques, devinant les images que peut capter l’objectif d’un appareil photo ou celui d’une caméra, et recherchant la façon dont les mots « qui s’engouffrent dans les béances du temps » peuvent traduire l’errance des hommes perdus dans une Europe constamment bouleversée. Certains de ses précédents livres, Les Trapézistes et le rat (2001), L’Amant en culottes courtes (2006) ou Prolongations (2008) reviennent par flashs dans ce nouveau roman, ajoutant leurs images à d’autres images pour conjurer le temps qui passe et, surtout, construire une narration dont la première logique est de faire des mots un appel au regard. — Gilles Heuré

 

Ed. Grasset, coll. Vingt-six 480 p., 22 €.

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