Catel aime les femmes illustres. Après Kiki de Montparnasse et Olympe de Gouges, la dessinatrice consacre sa nouvelle « bio-graphique » à Benoîte Groult. Avec cette fois une énorme différence : son modèle est vivant et a son mot à dire. Plus qu’un récit circonstancié de la vie et de l’œuvre de l’auteure féministe, Catel narre l’amitié qui la lie à cette femme de 93 ans qui n’a toujours rien d’une vieille dame.
Commencé il y a cinq ans, cet ouvrage mélange les souvenirs de Benoîte Groult (son enfance, ses amours, ses combats) aux échanges qu’ont eus les deux femmes pendant cette période. Toutes les choses vues aussi par la dessinatrice au cours de ses multiples séjours dans les différentes résidences de l’écrivaine : objets, détails, croquis réalistes qui rythment ce témoignage à plusieurs voix. Pas de révélations fracassantes pour ceux qui connaissent déjà l’auteure d’Ainsi soit-elle (si ce n’est peut-être sa très étroite amitié avec François Mitterrand) ; les autres découvriront une personnalité et une trajectoire peu communes. Ou comment une fille de bonne famille et épouse bien rangée est devenue à mi-vie une pasionaria de l’égalité des sexes, puis une véritable matriarche.
Empreinte d’admiration et de bienveillance, cette évocation évite cependant l’écueil du portrait en pied. Sans s’y appesantir Catel fait état de certaines déclarations de Benoîte Groult, au moment de l’affaire DSK (« Le viol, c’est pas la mort »). Ou relate le peu d’estime de l’écrivaine pour la BD, « une sous-culture qui ne saurait en rien remplacer la lecture », un débat qui évidemment les oppose tout au long de l’ouvrage. Frais, vivant, allegro, le dessin de Catel et son talent pour rendre captivants les jeux de la conversation et du hasard font mouche une fois encore. Benoîte Groult peut remercier le neuvième art.
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