Lumière du monde

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Lumière du monde

Les livres de James Lee Burke sont comme des opéras, avec des récitatifs, des tempos différents et un finale dont seul un homme qui a vu la mort au fond des yeux aurait pu écrire le livret. Dave Robicheaux, inspecteur aux homicides à New Iberia, en Louisiane, est ici en vacances dans l'ouest du Mon­tana, dans la maison d'Albert Hollister, un écrivain et professeur à la retraite. Il est venu avec sa petite tribu : sa femme, Molly, et sa fille adoptive, Alafair. Il y a aussi Clete Purcel, son ami, détective privé et ex-flic, et sa fille « hors mariage », Gretchen, ancienne tueuse de la mafia à l'enfance tragique qui a récemment surgi dans sa vie. Tout aurait pu se passer tranquillement, Alafair occupée à l'écriture de son livre, Gretchen à ses nouveaux projets de documentariste et les deux copains à traquer les truites dans les eaux glacées. Mais voici qu'un sadique multiréci­diviste, Asa Surette, vient menacer Alafair et commettre les pires atrocités en enlevant des jeunes femmes.

Comme dans tous les précédents romans de Burke, Robicheaux a le cuir bien tanné et l'esprit clair, sauf quand les souvenirs du Vietnam ou de chasses à l'homme meurtrières viennent le hanter. Il n'a pas besoin des sciences cognitives ou des traités de crimino­logie pour évaluer le degré de sincérité ou de saloperie des hommes à qui il a affaire : Asa Surette doit être éradiqué de la surface de la terre. Il comprend aussi rapidement que Wyatt Dixon, un cow-boy de rodéo au parcours fracassé par ses séjours en prison, a des intuitions peu communes, et que le pétrolier milliardaire Love Younger et son fils dégénéré sont gangrenés par un haut degré de perversité. Quant à Clete Purcel, son ami, « l'homme le meilleur du monde », définition qui n'est pas partagée par tous…, son profil oscille entre le plantigrade vorace et l'homme irrémédiablement blessé, capable de briser les os d'un semblable ou de dire amoureusement à une femme qu'elle est « une orchidée dans un jardin qui n'a jamais vu le soleil ».

Les deux hommes ont pris de la bouteille, mais sont toujours prêts à régler les situations avec les méthodes qui s'imposent – de celles qui ont conduit jadis à un règlement de comptes à OK Corral… Dans ce magnifique Lumière du monde, aux dialogues percutants, on songe à Terrence Malick. De la même façon qu'il décrivait le bayou dans d'autres livres, Burke médite ici sur la nature du Montana et les morts qu'elle abrite : la lumière bleue qui coule dans un canyon, le vent qui caresse le faîte des mélèzes, les traces des cerfs et des castors dans les ruisseaux asséchés, les âmes errantes des Indiens massacrés au xixe siècle. Burke met ses bottes dans les traces de Thoreau et Whitman, sans oublier que la violence peut faire basculer ses personnages dans un combat à mort contre le mal absolu. Aussi soudainement que les éclairs qui déchirent les flancs des dangereuses et majestueuses montagnes du Mon­tana…

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