Les Incrustacés

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Les Incrustacés

Jusqu’où aller trop loin quand, à délirer en roue libre, on risque l’implosion du récit et son naufrage en n’importe quoi ? C’est le défi que Rita Mercedes relève avec ce conte aussi fantastique qu’aquatique. Dans une station balnéaire de nulle part, intemporelle, un homme, solitaire, creuse, au sens propre, son trou dans le sable pour échapper à la ridicule agitation des vacanciers. Le dénommé M., frimeur, l’embarque de force dans une croisière sans but – sinon l’Aventure avec majuscule et en rafales de coups fourrés. L’auteure ne se prive de rien : confrontation avec des créatures marines grotesquement fabuleuses, apparition d’une monumentale mégère nommée… Médor, ou naufrage épique précipitant nos (anti)héros sur une île habitée par une peuplade débonnaire, les Ostraciens, « qui consacrent un temps considérable à se saluer et à se complimenter sur leur habillement… ».

Chaque péripétie disloque le récit pour mieux le propulser hors de toute réalité tangible. Dans l’outrance théâtrale, désarticulée, qui est le propre du rêve – et même, ici, d’un rêve dans le rêve… –, le style graphique de Rita Mercedes, par ailleurs illustratrice reconnue, est décisif : il conjugue magistralement une expressivité débridée des formes et le fini minutieux d’un trait à la plume tout en hachures, flirtant avec la gravure. Sans case ni bulle, mais avec, en contrepoint de chaque image, un texte qui aime les mots, tout en vrai-faux premier degré décalé, c’est le dessin qui impose la cohérence d’un univers hors norme, cachant, dans les détails, les échos et les correspondances visuels, les signes d’une narration subtilement travaillée.

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