Dans un monde où l’humanité a disparu survivent des intelligences artificielles qui attendent le retour de l’Homme comme d’autres attendaient jadis celui du Messie. L’une d’elles, Plautine, exilée aux confins de l’Empire, va bientôt capter un signal et s’attacher à un chef de guerre, Othon… L’agrégation de philosophie peut-elle se marier avec R2-D2 ? Normalien et nouveau venu sur la scène littéraire, Romain Lucazeau (né en 1981) prouve que oui, avec un roman dont l’ampleur et la réussite sont rares dans la SF française. Non que les références n’y pullulent pas : l’auteur cite Leibnitz, Platon, Pythagore et Corneille. Il se demande ce que sont la conscience et la foi, ce qui fonde l’humanité, quel sens ont nos quêtes. Et l’implacable destin qui pousse des machines trop humaines vers leur accomplissement lorgne d’évidence vers la tragédie grecque.
Pourtant, la fluidité du style, la maîtrise de la narration et la force de la vision évitent que tout cela soit scolaire. Ce flirt avec les mythologies comme l’ampleur du livre (près de mille pages en deux volumes) font souvent comparer son auteur au grand Dan Simmons, l’auteur d’Hypérion et Ilium. Si la couronne est encore un peu large, on peut attendre beaucoup de cet auteur débutant, dont le principal défaut est d’avoir voulu faire trop riche — mais quand tant d’autres se distinguent par leur pauvreté, on ne va pas se plaindre… — Hubert Prolongeau
Ed. Denoël, coll. Lune d’encre, 464 p., 22 € (vol. 1) et 512 p., 22,50 € (vol. 2).
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