La Corde et le vent

Ajouter un commentaire

La Corde et le vent

Le cordeau et le souffle, voilà les immenses qualités littéraires de La Corde et le Vent. Elvire de Brissac s’y révèle et s’y dérobe, avec un art consommé du rentre-dedans et de l’esquive. Ses phrases sonnantes et trébuchantes moquent et caressent. Dans un mouvement élastique, rythmé en diable, elles synthétisent et déploient les souvenirs les plus enfouis, visuels, sensitifs, cérébraux. « Il est un point sur lequel je dirai la vérité, c’est que je raconte des mensonges », dit Lucien de Samosate, cité en exergue du livre.

Les Boussoglou, dont la saga familiale est ici narrée, sont-ils les Brissac passés à la brosse décapante, puis parés d’atours parfois clownesques ? La vérité ne sera pas lâchée. L’autofiction, très peu pour Elvire de Brissac. Place à la littérature, masque protecteur, priorité absolue, irréprochable. Un « bel-ami » lui glisse, « avec un son de clairon égaré », dans un élan trop longtemps retenu : « écoute-moi bien, je suis ton père », puis la confession retourne au oubliettes, le mouchoir par-dessus. Le texte est plein de ces bulles qui explosent et disparaissent à la surface, en toute légèreté, d’une élégance rare.

L’humour cinglant reste l’arme de défense préférée de cette romancière pudique, sensible au temps qui passe. En prise sur chaque époque traversée, la Seconde Guerre mondiale, l’Union soviétique des années 60, où « les visages s’échappent, tout est de bois, le cou des femmes, les épaules des hommes », ou encore la France de Mai 68, elle n’a pas les yeux dans sa poche, ni son pareil pour résumer les situations à coups de formules ciselées. En fuite permanente, voyageuse sur la planète comme à l’intérieur d’elle-même, cette femme a la bougeotte, et un centre de gravité inébranlable : l’écriture.

Commandez le livre La Corde et le vent

Laisser une réponse