La Cavale du Dr Destouches

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La Cavale du Dr Destouches

Plus d’un demi-siècle après sa mort, Louis Ferdinand Destouches, alias Céline, reste un personnage encombrant. Figure étincelante de la littérature française et célébré comme tel avant guerre, l’auteur de Voyage au bout de la nuit est devenu un intouchable. Sa faute : une trop grande proximité avec les milieux collaborationnistes sous l’Occupation, et surtout un antisémitisme viscéral, quasi pathologique, exprimé notamment dans Bagatelles pour un massacre et L’Ecole des cadavres. Doit-on pour autant faire l’impasse sur l’homme et cantonner aux enfers une oeuvre aussi marquante ? La question reste ouverte, bien malin d’ailleurs qui lui trouvera une réponse satisfaisante…

L’acteur et auteur Christophe Malavoy, dont on sait l’admiration pour l’ermite de Meudon, a signé le scénario de cette Cavale du Dr Destouches. Après le débarquement des forces alliées, en juin 1944, Céline, sa femme et son chat Bébert mettent le cap sur l’Allemagne, direction Baden-Baden, Berlin et Sigmaringen. Une escapade accidentée, ubuesque, littéralement surréaliste, tant dans les rencontres que les situations, dont Céline a tiré la matière d’Un château l’autre, Nord et Rigodon et que cette BD sait parfaitement restituer, ce qui est déjà en soi une performance.

S’il y a, en creux, l’envie de réhabiliter Céline, ou tout au moins de le présenter seulement comme un anar atrabilaire qui conchie en bloc les honneurs, les politiques et toutes sortes de compromis, Malavoy parvient cependant à garder le cap et le tempo. Noir de plomb et de fusain, entre caricature et scène de genre, le dessin des frères Brizzi réussit — presque — à faire oublier celui de Tardi, qui s’est colleté, lui aussi, à l’univers célinien. Rarement l’atmosphère délétère d’un monde qui s’écroule, la folie des derniers instants auront été campées avec autant de force ! — Stéphane Jarno

 

Ed. Futuropolis, 96 p., 17 €.

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