Jacques de Bascher. Dandy de l’ombre

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Jacques de Bascher. Dandy de l’ombre

« C’était le diable fait homme avec une tête de Garbo », dit Karl Lagerfeld de Jacques de Bascher (1951-1989), qui fut et demeure le grand amour de sa vie. « Dandy de l’ombre », le qualifie le sous-titre de cette biographie très documentée que lui consacre la journaliste ­Marie ­Ottavi, ancrant son portrait dans un minutieux tableau d’époque : les décennies 1970 et 1980 qui virent ce garçon aux allures de Robert de Saint-Loup hanter jusqu’à l’épuisement les nuits parisiennes et imprimer pour toujours sa silhouette d’esthète décadent au tout premier plan de la légende sulfureuse que ces années festives jusqu’à la nausée ont depuis suscitée. Si Jacques de Bascher fut audacieux, arrogant, pervers, mégalomane, l’ambition qui dictait ses actes et ses postures n’était pas sociale. « Il était tout sauf un arriviste. Il n’a rien fait d’autre que de laisser agir son charme », assure son jeune frère. « J’admirais sa désinvolture et son absence totale, presque cynique, d’ambition carriériste », se souvient Lagerfeld, qui s’impose vite comme la figure centrale du livre, acteur distancié naguère et aujourd’hui passionnant témoin.

Qu’est-ce qui fit courir Jacques de Bascher ? Quel miroir renvoya-t-il à ce milieu artistico-mondain qui avait décidé de faire de lui son prince ? Telles sont les questions qui sous-tendent le récit de Marie Ottavi tandis qu’elle déroule le fil biographique (l’enfance dans l’Ouest parisien, plus tard la frénésie nocturne, champagne et cocaïne, la relation délétère avec Yves Saint Laurent…), sans hésiter à ouvrir largement l’objectif afin d’embrasser l’époque si singulière — libertaire, suicidaire — qui vit éclore cette drôle de fleur vénéneuse et toxique que fut Jacques de Bascher. « Il travaillait un personnage qu’il assumait vingt-quatre heures sur vingt-quatre […]. Jacques était la créature, le créateur, la création », analyse un de ses amis. Au nom du romantisme scabreux dont il avait fait sa foi, lui-même estimait : « Etre décadent, c’est une façon sublime de choir. C’est un très lent mouvement vers le bas qui est empreint d’une immense beauté […]. S’autodétruire d’une façon sublime et tragique. » — Nathalie Crom

 

Ed. Séguier, 296 p., 21 €.

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