Genius

Ajouter un commentaire

Genius

Que se passerait-il s’il y avait un chef d’orchestre clandestin ? Si les émeutes qui embrasent régulièrement les villes américaines s’inscrivaient dans un plan mûrement réfléchi. Si, au lieu d’être spontanée et désordonnée, la violence des gangs était canalisée, structurée, pensée… Ce cauchemar, qui hante l’Amérique des beaux quartiers, nourrit l’intrigue de Genius. Mais là où des films d’anticipation comme New York 1997 ou American Nightmare surfent sur la surenchère et l’invraisemblable, Bernardin, Freeman et Richardson ont imaginé une fiction terriblement réaliste : l’histoire d’une gamine surdouée, née dans un ghetto de Los Angeles, en butte depuis l’enfance au racket, à la guerre des gangs et aux violences policières.

Elevée dans la rue, consciente qu’être bonne en classe ne lui vaudra que des soucis, Destiny cultive discrètement ses talents de stratège en jouant aux échecs et en lisant, à la bibliothèque du quartier, Le Prince, de Machiavel, ou L’Art de la guerre, de Sun Tzu. Implacable, cette meneuse-née organise sa guerre contre les forces de l’ordre avec science et audace. Si elle sait trouver les mots avec ses troupes et passe pour une pasionaria auprès des gens du quartier, la jeune femme, pourtant, se soucie peu d’idéaux ou de politique. Destiny ne fait qu’exercer un talent inné pour la guerre et le chaos, saisissant la moindre étincelle pour faire partir des feux. Efficace à défaut d’être original, le graphisme n’est pas le point fort de ce one shot. L’étude du personnage, en revanche, et plus encore la peinture du quotidien dans un quartier de laissés-pour-compte, aux confins de la mégalopole, sont particulièrement réussis. Mieux encore, elles apportent un éclairage cru et pertinent sur les violences urbaines outre-Atlantique. — Stéphane Jarno

 

Ed. Delcourt, 144 p., 16 €.

Commandez le livre Genius

Laisser une réponse