Florilège

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Florilège

« Annie Saumont n’était pas fragile, elle était inflexible », écrit si justement Josyane Savigneau, dans la préface admirative et émue qu’elle donne à ce Florilège de quarante-cinq nouvel­les, choisies parmi les centaines qu’a écrites l’auteure disparue le 31 janvier, à la veille de ses 90 ans. Obsédée par l’écriture, concentrée sur le texte court, Annie Saumont ne lâchait rien. Ni la minutie d’un dialogue, ni une ponctuation musicale comme suspendue, ni la description implacable d’un quotidien qui se prend à dérailler.

La nouvelle était sa distance idéale depuis ses débuts, lui permettant de pointer du doigt le basculement d’un sentiment, l’instant où tout se dévoile. Puis elle repartait à pas légers, laissant le lecteur pantois achever l’histoire, imaginer l’issue de la crise, une séparation ou pire encore. Cette narratrice des petites choses parvenait ainsi à raconter une vie en trois pages, visant toujours le coeur de la cible. L’air de rien, Annie Saumont décrivait aussi la société, la famille, les jeunes incompris, les vieux trébuchant. « Odeur aigre-douce de coussins râpés, de rideaux fanés. Même si tout est propre. Relents d’eau de Cologne, de sirop pectoral. Odeur de vieillesse… »

Les titres de ses recueils étaient tout un monde entrouvert : Les voilà quel bonheur, Moi les enfants j’aime pas tellement, Si on les tuait ? Quelquefois dans les cérémonies, C’est rien, ça va passer… On y dénichait, selon les histoires, un trait d’humour (noir), un regard panoramique, une affection particulière pour les éclopés. Et une modestie qu’Annie Saumont continue de payer aujourd’hui encore, même si elle reçut quelques prix littéraires, comme le Goncourt de la nouvelle. Que ce beau recueil la place enfin sur le devant de la scène, en pleine lumière. — Christine Ferniot

 

Ed. Julliard, 432 p., 21 €.

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