Dans ce jardin qu’on aimait

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Dans ce jardin qu’on aimait

L’argument est irréel et poignant comme celui d’un conte : il était une fois, au xixe siècle, dans un presbytère isolé au nord de l’Etat de New York, un veuf inconsolable qui chercha à apaiser son chagrin en notant phonétiquement, sur une page blanche – cela un demi-siècle avant l’irruption sur cette terre d’un génie nommé Olivier Messiaen… -, « tous les chants des oiseaux qu’il avait entendus, au cours de son ministère, venir pépier dans le jardin de sa cure ». Attentif aussi « à l’appel des chants de la forêt et des vagues des onze lacs glaciaires qui entouraient sa maison », notant « jusqu’aux gouttes de l’arrivée d’eau mal fermée dans l’arrosoir sur le pavé de sa cour ».

Il était une fois… Même s’il ne figure pas explicitement, l’incipit est souvent suggéré au seuil des livres de Pascal Quignard. En l’occurrence, il ne s’agit pas d’une fable, l’homme d’Eglise éploré se nommait Simeon Pease Cheney. Il est mort en 1890, à 72 ans, léguant aux hommes le fruit de ses observations sonores patientes, sous la forme d’un opus intitulé La Musique des oiseaux (en VO, Wood Notes Wild). Cet homme pour toujours et à jamais inconsolé, mais qui survécut, le coeur navré, en se postant dans le jardin qu’avait pensé et planté son épouse pour s’y mettre à l’écoute de la beauté du monde, Pascal Quignard le place au centre de Dans ce jardin qu’on aimait – moins un roman qu’une cantate à plusieurs voix (Simeon, sa fille, Rosemund ; son épouse morte, le récitant), un chant grave et épuré, un hymne à l’amour éternel. — Nathalie Crom

 

Dans ce jardin qu’on aimait, éd. Grasset, 170 p., 17,50 €. Viennent aussi de paraître Une journée de bonheur, aux éditions Arléa (146 p., 11 €), une grisante méditation sur l’instant, et Performances de ténèbres, chez Galilée (256 p., 26 €), une réflexion sur la scène et la représentation, irriguée d’autobiographie.

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