C’est toi ma maman ?

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C’est toi ma maman ?

Sa mère a cessé de l’embrasser quand elle a eu 7 ans. C’est une clé dans la quête labyrinthique d’une femme cherchant encore aujourd’hui à capter la reconnaissance de sa mère. Il y en a d’autres, beaucoup d’autres… On sait depuis Fun Home, paru il y a six ans, qu’Alison Bechdel n’a pas son pareil pour traquer une vérité intime largement insaisissable. Elle racontait alors comment, à 19 ans, elle avait révélé son homosexualité au moment même où était dévoilée celle de son père, mort peu après dans un accident qu’elle a toujours considéré comme un suicide. C’est l’impossible résumé d’une exploration à tonalité tragi-comique, étincelante d’intelligence.

Dans ce deuxième volet, l’auteure met en scène sa vie comme elle va tandis qu’elle se débat avec l’écriture de ce nouveau livre, où l’héroïne – sa mère, donc –, plus que réticente, peut, à tout moment, en compliquer le cours (leurs fréquents échanges téléphoniques sont, à ce titre, d’irrésistibles dialogues de sourd[e]s). Dans un foisonnement d’images et de mots articulés avec une grande sophistication, elle mêle les aléas de sa vie amoureuse, les séances d’analyse et les liens qu’elle y noue avec l’une puis l’autre des thérapeutes, ses lectures, de Virginia Woolf, la grande inspiratrice de cette introspection rien moins que complaisante, à Donald Winnicott, célèbre pédopsychiatre britannique où elle puise de quoi revisiter sa propre enfance. Sans oublier ses rêves, minutieusement décrits par le dessin, chacun servant de détonateur à des retours persistants sur le passé comme autant de questions à élucider. « Ecrire de la fiction ne m’intéresse pas, explique-t-elle au passage. Je ne peux pas inventer des choses. Ou plutôt je ne peux inventer qu’à partir de choses qui se sont déjà produites. »

Alison Bechdel confirme avec éclat que plus la vérité se dérobe, plus le jeu de piste en vaut la chandelle. L’effet persistant qu’elle en tire est assez vertigineux.

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