Bienvenue dans le monde merveilleux des Mici ! Derrière ce délicieux acronyme qui évoque les petits noms que l’on donne aux enfants, une réalité moins joyeuse, celle des maladies inflammatoires chroniques de l’intestin. De chouettes affections « modernes » qui se déclarent souvent entre 20 et 30 ans, et flétrissent précocement ce qui est censé être la fleur de l’âge. Pozla en est atteint, et il raconte par le menu l’ordinaire des quelque cent cinquante mille personnes qui vivent en France avec la maladie de Crohn ou la rectocolite hémorragique. Et, dans son cas, le long parcours du combattant pour identifier et traiter son mal.
Car, même au xxie siècle, les Diafoirus ne manquent pas. Gare aux « bons » docteurs qui, devant des symptômes récurrents, invoquent systématiquement le stress et la somatisation… Ces erreurs de diagnostic, sa confiance aveugle dans l’autorité médicale, l’auteur a failli les payer cher. Elles le conduiront dans les profondeurs de l’hôpital, de la détresse et des médicaments. Sans cacher, sans enjoliver la réalité de ces maladies qui font des toilettes une pièce à vivre, ce récit au quotidien ne donne jamais dans le scabreux. Comme Reiser, un maître qui semble l’avoir beaucoup influencé, tant dans le trait que dans l’esprit, Pozla parvient à trouver un peu de lumière dans les ténèbres les plus denses. Une idée graphique, un éclair de poésie, de l’émotion à fleur de planche et, surtout, la rage de rire de tout propulsent souvent cet album vers les hauteurs. Plus qu’un témoignage précieux sur des maladies « cachées » et en pleine expansion, Carnet de santé foireuse est un exutoire, le cri puissant d’un artiste qui ne s’est pas résigné. — Stéphane Jarno
Ed. Delcourt, 368 p., 35 €.
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