L’Homme qui tua Lucky Luke

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L’Homme qui tua Lucky Luke

Le western est un saloon bondé, pour y trouver sa place il faut savoir jouer des codes… Matthieu Bonhomme heureusement n’a rien d’un pied-tendre. A 42 ans, le dessinateur a déjà plusieurs virées dans l’Ouest à son actif (dont le remarqué Texas Cowboys, avec Lewis Trondheim) et maîtrise aussi bien l’imagerie du genre que les rouages du récit d’aventures. S’attaquer à Lucky Luke pourtant, l’un des sommets de l’école franco-belge, n’a rien d’un tour de manège. Pensée, balisée, rodée pendant plus d’un demi-siècle par Morris, son génial créateur, extrêmement graphique, la saga du pauvre cow-boy solitaire est un mécanisme d’horlogerie qui déconcerte les artisans les plus ­habiles. Il a ainsi fallu plusieurs albums et beaucoup d’abnégation à Achdé, perpétuateur officiel de la série, pour parvenir à s’en saisir.

Pour cet album hommage, unique et sans suite, Bonhomme a pris l’option inverse. Plutôt que se glisser dans la peau du maître, d’imiter à tout prix son coup de crayon, le dessinateur a incorporé le légendaire cow-boy à son propre univers. Comme dans Esteban, sa série fétiche, la tonalité est plus sombre, plus réaliste ; il n’y a pas que de l’amour, et les coups de poing font mal. La greffe était délicate tant la magie de Lucky Luke tient à peu de chose, mais elle a pris.

Si, dans ce nouvel album, le cow-boy qui arrive à Froggy Town n’a pas exactement les traits de celui de Morris, si les gags cèdent la place à l’humour et si, une fois n’est pas coutume, il y a bien mort d’homme, la petite musique pourtant demeure. Couleurs ­pétantes, tempo ma non troppo, personnages secondaires bien campés, comme l’émouvant Doc Wednesday ou la fine guêpe Laura Legs, Matthieu Bonhomme a su garder le cap. Le héros de notre enfance a certes (un peu) vieilli. Ça tombe bien, nous aussi ! — Stéphane Jarno

 

Ed. Dargaud, 64 p., 15 €.

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