33 révolutions

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33 révolutions

Né à La Havane en 1974 et décédé l’an dernier, Canek Sánchez Guevara était le petit-fils du Che. Artiste libertaire, il a écrit 33 révolutions, son unique roman, comme trente-trois photographies ou trente-trois pages de journal : de petits textes sur la vie quotidienne, l’apathie d’un peuple qui n’a plus d’espoir. Cuba est comme « un disque rayé », on y entend toujours les mêmes paroles officielles et les mêmes silences. Tout s’effondre, les murs des maisons comme les idées politiques. Le narrateur travaille dans un ministère, où règne l’ennui, ses seules occupations consistant à faire des photocopies, à tamponner des circulaires, à attendre l’heure du déjeuner puis celle du départ. Quant à sa vie personnelle, elle se réduit à boire du rhum frelaté, à flâner sur le Malecón pour regarder la mer, aussi infranchissable qu’un mur de barbelés, et à rencontrer la Russe qui habite au neuvième étage de son immeuble, une femme dont même le corps est « plein de réalisme socialiste ».

Le narrateur le sait : « Il n’y a rien de positif à attendre d’aujourd’hui. Dans les jours pareils, la vie lui semble […] un traité de l’inutile et du superflu, et il marche lentement, les yeux rivés au sol, avec l’envie de tomber dans le caniveau et de mourir écrasé par l’habitude. » Dans 33 révolutions, on entend les télévisions qui diffusent les telenovelas et l’on sent l’humidité poisseuse de La Havane. Quant à la politique, elle est morte depuis longtemps, et ne survit que dans le disque rayé d’une lointaine et historique révolution cubaine… — Gilles Heuré

 

33 revoluciones, traduit de l’espagnol (Cuba) par René Solis, éd. Métailié, 112 p., 9 €.

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