Les Wagons rouges

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Les Wagons rouges

Quelle modernité dans l’écriture de Stig Dagerman (1923-1954), dont les éditions Maurice Nadeau ont la bonne idée de rééditer les livres recroquevillés dans l’oubli… Le mois dernier, c’était son roman bergmanien Ennuis de noce qui retrouvait vie, avec son cortège foutraque de personnages anarchistes dans l’âme. Suit aujourd’hui le réveil d’un recueil de nouvelles fantastiques, Les Wagons rouges, qui cisaille les certitudes et les idées toutes faites avec une froide détermination. Fidèle à la conviction phare de son oeuvre selon laquelle rien n’est jamais rattrapable, Stig Dagerman y met en scène une série de situations de désespoir, à la fois détachées et hallucinées. Très marquée par l’expressionnisme allemand, la nouvelle titre suit la dérive monomaniaque d’un jeune garçon qui a remarqué que le train passant chaque nuit sous ses fenêtres est tagué de dessins rouges effrayants. La vision réveille le mal au fond de son être : « Lui qui a toujours eu sa place sur l’enclume, il a tout à coup envie de jouer les marteaux. »Plus proche d’Albert Camus, la nouvelle « Le condamné à mort » décortique les réflexes de survie d’un homme sauvé de l’échafaud grâce au malaise de son bourreau. Loin de goûter le plaisir du salut, le prisonnier énonce froidement ses techniques d’isolation mentale, dont « l’habitude depuis longtemps de ne s’autoriser que de très brèves réflexions ». Brèves, mais fulgurantes, et mises en mots décapants, toujours à traquer la fausseté des êtres ou des situations. — Marine Landrot

 

Nattens Lekar, traduit du suédois par Carl Gustaf Bjurström et Lucie Albertini, éd. Maurice Nadeau, 184 p., 18 €.

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