Les Grands

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« I muri », elle est morte : c’est pour délivrer ce message que, ce matin d’avril 2012 , le téléphone a sonné dans la minable chambre de Couto, à Bissau. I ­muri : Dulce est morte. Dulce fut jadis l’amoureuse de Couto et la voix du groupe rock Super Mama Djombo, dont il était l’un des guitaristes. Mais ça, c’était il y a plus de trente ans, aux premières heures du triomphe de Super Mama Djombo, ici en Guinée, et ailleurs, à Dakar, en Angola, au Mozambique, jusqu’à Cuba, jusqu’en Europe. Depuis, la formation s’est dissoute. Saturnino Bayo, dit Couto, a aujourd’hui près de 60 ans, le corps douloureux comme celui d’un vieillard — « Seigneur invariablement désoeuvré, invariablement fauché, mais qui n’avait qu’à trimbaler son pas usé par les rues pour que tous les regards s’arrêtent sur lui. »

Dans Les Grands, roman tissé de réel et de fiction, porté par une écriture hybride savamment constellée de créole, Sylvain Prudhomme suit la déambulation de Couto dans les rues de Bissau, en ce jour de 2012 où Dulce est morte au matin — et où ses anciens partenaires décident d’un concert improvisé en son hommage, qu’ils donneront le soir. Au périple urbain de Couto, dans une ville sous la menace d’un coup d’Etat imminent, se mêle un autre voyage, dans ses souvenirs où les traces de Dulce se superposent à la mémoire collective de la Guinée, depuis la guerre d’indépendance. Sylvain Prudhomme dotant ainsi d’une dimension politique et historique son beau roman, hautement mélancolique et magnétique. — Nathalie Crom

 

Ed. Gallimard, coll. L’Arbalète 254 p., 19,50 €.

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