Les Corbeaux

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Les Corbeaux

Si vous avez aimé le film Kes, de Ken Loach, ce livre est pour vous. Comme son titre l’indique, ce premier roman d’un auteur de 50 ans est traversé d’oiseaux. « Ce que les corbeaux veulent, ils l’ont », martèle le grand-père de Klas, un garçon de 12 ans qui se nourrit de feuilles de tremble et passe ses journées à observer les volatiles près de la ferme de ses parents. Sa passion pour l’ornithologie offre de très belles pages, chantantes et inquiétantes, enfouies dans une nature où les oiseaux de mille espèces dictent leur loi. Quand il pleut, par exemple, c’est que l’oiseau-tonnerre, qui porte un lac sur son dos, s’est retourné en plein vol. Mais Klas n’est pas un corbeau, et il n’a pas ce qu’il veut. Il ne parvient pas à redonner le sourire à sa mère, dont la silhouette ressemble de plus en plus à celle des vaches de l’étable. Et son souhait le plus cher serait que son père guérisse de sa folie, qui lui fait croire que les corbeaux lui scient le cerveau.

Les oiseaux du livre prennent alors une autre signification. Incarnations maléfiques des angoisses qui rongent ce fermier jusqu’à le mener à l’asile, ils planent comme des ombres menaçantes. Cette ambivalence jette un trouble sur le roman, et révèle son thème profond : la difficulté pour un enfant de faire le tri dans son héritage et de transformer ce qu’il a reçu pour voler de ses propres ailes. Souvent les chapitres commencent par des phrases sans verbe. Impressions indélébiles ­ancrées dans la mémoire du héros, arrêts sur image qu’il aimerait remettre en mouvement pour que la vie retrouve un cours paisible. Puis l’écriture s’anime, comme poussée par le vent, emportée par les éléments qui font la pluie et le beau temps dans la tête de Klas. Les blocages se déverrouillent, une fluidité s’installe. Alors l’enfant grandit sous nos yeux, et mérite amplement son prénom. — Marine Landrot

 

Korparna, traduit du suédois par Christofer Bjurström, éd. Gallimard, 484 p., 26,90 €.

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