La Mort d’un homme

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La Mort d’un homme

« Assez mentir ! Vous savez tout aussi bien que moi que je me meurs », supplie Ivan Ilitch, et ce mensonge qui consuma les derniers jours du personnage de Tolstoï, Charles et Lael Wertenbaker n’en ont pas voulu. Charles Wertenbaker apprit, en septembre 1954, qu’il était atteint d’un cancer et n’en guérirait pas. « Mourir est la dernière chose que j’aurai la chance de bien faire. J’espère de toutes mes forces y réussir », dit-il alors à son épouse. Il s’éteignit trois mois plus tard, en janvier 1955, à 53 ans. Lael Wertenbaker prit alors la plume pour raconter les quelques semaines qui s’écoulèrent entre l’annonce du diagnostic fatal et le décès de son mari. La Mort d’un homme parut en 1957, récit sobre et grave, d’une rare franchise jusqu’à la dernière ligne, d’une troublante noblesse de bout en bout. Essoré de tout épanchement de tristesse, et comme exhaussé par ce choix de la pleine lucidité qui avait été celui de Charles face à sa mort annoncée — il avait récusé l’idée du suicide, fort du « sentiment qu’il devait à sa dignité d’être humain de faire l’essai de la souffrance avant de mourir ».

Charles et Lael Wertenbaker, l’un et l’autre américains, journalistes au Time Magazine, s’étaient rencontrés à Londres en 1940, mariés deux ans plus tard, installés en France après la guerre. Et c’est à Ciboure, face à Saint-Jean-de-Luz, qu’ils avaient posé leurs valises, et bientôt donné naissance à deux enfants. La mort pour perspective, Charles « ne changea pas. Et, puisqu’il restait le même, […] il consolida, agrandit, purifia tout ce qui faisait de lui un adulte pendant le temps qui lui restait », écrit Lael Wertenbaker. Dessinant, en filigrane du très beau portrait de son fier époux, celui de l’amour tendre et indéfectible qui les unissait. Et confiant « la pureté d’une douleur sans remords » qui constitue le legs de Charles. — Nathalie Crom

 

Death of a man, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Geneviève Naudin, préface d’Olivier Mony, éd. Séguier, 248 p., 19,90 €.

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