Jamais contre, d’abord

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Jamais contre, d’abord

« Un homme n’a plus mal au dos. Il avait mal quelques minutes plus tôt. Il s’était contenté de rectifier discrètement sa position dans le fauteuil. » Dans cette historiette, que l’on pourrait croire totalement insipide, voire un peu bécasse, se loge en fait le secret d’une méthode haute en couleur : celle de François Roustang, penseur dissident des plus insolents, dont les éditions Odile Jacob réunissent aujourd’hui trois ouvrages — La Fin de la plainte (2000), Il suffit d’un geste (2003) et Savoir attendre (2006). Né en 1923, ce psychanalyste hétérodoxe a d’abord été père jésuite, directeur de la revue Christus, avant de s’attaquer à Sigmund Freud et à Jacques Lacan, en un double et éclatant parricide. Pour lui, en effet, l’exploration de l’inconscient est un geste imbécile. A l’obsession de la connaissance de soi, cet amateur de Ludwig Wittgenstein (« Le corps humain est la meilleure image de l’âme humaine ») préfère l’action et le résultat. C’est en réhabilitant l’hypnose, qui nous ouvre au monde au lieu de nous replier sur nous-mêmes, que le praticien, fatigué par le très occidental souci de soi, a trouvé sa voie.

L’hypnose rend en effet possible un réel changement, contre les spirales induites par la répétition ou les déplacements inhérents au transfert. La méthode ? Absorber le symptôme. Ce que nous n’arrivons pas à digérer, et que nous ressassons sans cesse, François Roustang propose de s’en faire l’allié plutôt que de lutter contre : « Ce qui me reste sur l’estomac et me fait mal au ventre, je le mâche à nouveau et je l’avale. » Résultat ? « Le symptôme n’est pas un intrus ou un ennemi. Il suffit de lui proposer une place pour qu’il devienne un ami. » Exit le récit du malheur passé ! Asseoir sa peine dans le présent revient ainsi parfois à s’asseoir convenablement dans son fauteuil. Ou comment « guérir par le siège »… — Juliette Cerf

 

Ed. Odile Jacob, 752 p., 29,90 €.

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