Coeur glacé

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Coeur glacé

Résumons. Un quadra qui-a-tout-pour-être-heureux se désagrège au fil d’une gamberge le menant tout droit à une sévère déprime. Mais résumer cette histoire-là ne rime à rien. Conçue comme « un jeu de l’oie [où] il n’y a pas d’issue », elle se disloque dans le soliloque d’un adepte du coq-à-l’âne et du raccourci pseudo-philosophique, au gré d’interrogations existentielles en rafales qui, au-delà du malaise, de la solitude où il s’enferme, ne lui inspirent que lieux communs et tics de langage d’une insondable banalité (« L’argent n’est pas tout. Mais attention : il en faut »). Et pourtant, la médiocrité standardisée, atone, du personnage devient, contre toute attente, le tremplin d’une jubilatoire virée en roue libre dans sa tête, et, par ricochet, dans la société où il vit, la nôtre. « Un pied de nez, rien de plus » à celle-ci, affirment les auteurs.

On n’est pas obligé de les croire. Car, sous les apparences d’une sociologie pour rire, une ironie constante sape, mine de rien, toute velléité de bien-pensance, et le réel s’évapore, à l’occasion, dans un onirisme carnavalesque, voire légèrement inquiétant. Au très allègre démontage tout-terrain des idées reçues imaginé par Gilles Dal fait écho la mise en scène volubile, effervescente, de Johan De Moor, qui entremêle les styles graphiques, les collages, les apartés décalés, tout un débordement d’idées visuelles où le récit paraît s’éparpiller sans pourtant jamais se disperser. Reste en point de mire la question, obsessionnelle, que se pose cet antihéros de notre temps au « coœur glacé » (superbe titre) : la vie a-t-elle un sens ? Au vu de l’ultime planche, muette, mais très parlante, la réponse ne fait guère de doute : pour lui, c’est non…

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